David LevinthalDAVID LEVINTHAL, No Man’s Land est un photographe américain né en 1949, diplômé du MIT (1981), de Stanford (1970) et Yale (1973). Il a reçu le Guggenheim Fellowship en 1995 et le National Endowment for the Arts Fellowship en 1990-1991. Sa formation pluridisciplinaire, d’artiste plasticien et d’historien, lui a permis d’inventer à travers la photographie une nouvelle manière d’appréhender l’Histoire et la sociologie.
Les œuvres de David Levinthal ont été acquises et exposées par les musées les plus prestigieux, notamment le MoMA, le Chicago Institute of Art, le Centre Pompidou, le Fotomuseum Winterthur, la Corcoran Gallery of Art de Washington DC, le Los Angeles County Museum of Art, le Metropolitan Museum of Art, le Musée d'Art Moderne et le Whitney Museum of American Art, parmi beaucoup d'autres, ainsi que le Eastman Museum en 2015.

David Levinthal a produit une œuvre photographique variée, utilisant souvent les grands formats Polaroid. A l’aide des figurines et des jouets miniatures qu’il collectionne, met en scène puis photographie, il réussit à créer des images puissantes, parfois ironiques. Depuis la publication de son premier ouvrage très remarqué en 1977 (Hitler moves East, 1941-1943), Levinthal a travaillé avec différents modèles réduits pour explorer des thèmes de l’Histoire ou des stéréotypes de la culture populaire, comme la poupée Barbie ou le Baseball, en passant par le Far West ou la guerre. Pour l’artiste, les jouets ne sont pas anodins et nous montrent de quelle façon une société socialise ses enfants :
«Depuis que j'ai commencé à travailler avec des jouets, j'ai été intrigué par l'idée que ces objets apparemment bénins pouvaient prendre une telle puissance simplement par la façon dont ils étaient photographiés. J'ai commencé à réaliser, en choisissant avec soin la profondeur de champ, que je pouvais créer une impression de mouvement et de réalisme perturbants. »

La série History, de laquelle est tirée cette image, est le point culminant de l’œuvre de David Levinthal. Elle révèle la manière insidieuse avec laquelle l’imagerie populaire infiltre la mémoire, l’imaginaire et l’identité.

Après s’être intéressé à la seconde guerre mondiale (série acquise dans son intégralité par le MoMA de NYC), le nazisme, l’Amérique des années 50, le far West, les pin-up et l’érotisme, l’artiste s’est intéressé aux guerres d’Afghanistan et d’Irak.

Outre le fait que la photo immobilise le temps et gèle le mouvement, ce rapport particulier à l’expérience temporelle, consistant à montrer du passé au présent, a conduit bien des commentateurs à la relier à la mort, à la pétrification, au memento mori. « La mort est l’eidos de la photographie » (Barthes 2009). Ces considérations ont à leur tour amené à promouvoir la photographie, en vertu du pouvoir émotionnel qu’elle détient - sinon en vertu de son ontologie propre en instrument privilégié de la commémoration et de l’élégie. La photographie serait, en somme, un déni de l’immortalité. Mais alors, si tel est bien un trait fondamental de ce médium, si chaque photo d’un être humain, d’un paysage ou d’une scène de la vie urbaine est toujours déjà annonciatrice de sa disparition, que dire de particulier à propos des photographies de catastrophes ? Forment-elles vraiment une catégorie à part et, si oui, en quoi se distinguent-elles des autres ? L’argument développé par Dagmar Barnouw : « La photographie peut contribuer à une meilleure compréhension historique de la dynamique à l’œuvre dans la remémoration. Mais ce n’est pas parce qu’elle livrerait, à qui sait bien la regarder, un moment de vérité absolue qui ne se reproduira plus jamais ; c’est bien plutôt parce que la photographie détient un pouvoir particulier, n’appartenant qu’à elle : celui de laisser ouvert le champ de son interprétation, de permettre de multiplier dans le temps les actes de lecture qu’on peut en faire ». L’œuvre de David Levinthal, où la scénographie est délibérément visible, invite tout particulièrement à ce questionnement.

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