A Mingling State of Mind

A Mingling State of Mind

Livre d’artistes publié en 2018, par les éditions Take5 (Genève)
Photographies : Idris Khan
cinq tirages originaux signés Texte : Siri Hustvedt
Boitier : Idris Khan.
Graphic Design par Karen Gliozzo-Schmutz and Hadrien Gliozzo
- Studio Nordsix, Lausanne,
30 exemplaires
Dimensions: 35 x 28 x 6,5 cm

Le livre d’artistes Un état d’esprit fusionnel, explore la nature mystérieuse et mouvante de la psyché humaine. En liant l’esprit à l’âme, il cherche à ouvrir une fenêtre symbolique pour aller au delà de ce qui est regardé et explorer ce qui est ressenti.
Le texte de Siri Hustvedt questionne notre capacité à comprendre nos propres états d’âme, en exposant la complexité et la versatilité de nos émotions. Peut-on véritablement cerner un état d’âme, le nôtre ou ceux des personnes qui nous entourent ? Est-il l’empreinte d’un moment déterminé, ou la sédimentation d’émotions à travers le temps ? Peut-on légitimement dire que l’on connaît quelqu’un « par cœur » ?
Peut-on toujours établir une connexion profonde avec les autres, ou nous illusionnons-nous ?
La synesthésie (du grec Greek σύν syn, "ensemble", and αἴσθησις aisthēsis, "sensation") est un phénomène neurologique selon lequel la stimulation d’un canal sensoriel induit automatiquement d’autres sensations de nature différente.
Siri Hutvedt, qui enseigne la neurologie et la psychiatrie au Weil Cornell Medical College à NYC, démontre comment, à travers son texte, la synesthésie permet de comprendre la nature mouvante de nos impressions. Malgré tous nos efforts pour décomposer nos experiences à travers le prisme des sensations physiques et psychiques qui les constituent sur le moment, nous arrivons souvent à la conclusion que l’expérience est aussi façonnée par l’accumulation dans le temps de ces sensations.

Les volutes blanches des photographies d’Idris Khan, intitulées “White Windows” semblent symboliser ces différentes strates de notre psyché. Du point de vue de la représentation littérale, ces photographies représentent des vitrines opacifiées par des panaches de peinture blanche. D’un point de vue symbolique, elles évoquent également les méandres du cerveau, et la nébulosité des émotions de l’homme. L’artiste brouille les pistes en jouant avec l’opacité et le reflet, et semble arrêter le temps. En effaçant la frontière entre le permanent et l’impermanent, ce qui est révélé et ce qui est caché, il transforme l’instantané en intemporel.

En soulignant la beauté de quelque chose qui est habituellement considéré comme anecdotique ou incohérent, Idris Khan souligne l’importance d’un regard qui ne s’arrête pas aux apparences, et cherche la présence dans l’absence.
Les photographies “White Window” ont la texture de dessins au fusain. Leur velouté, leurs noirs profonds et spirales degradées évoquent l’abstraction des peintres chers à Idris Khan comme Agnès Martin ou Cy Twombly. Le theme de la répétition, central dans son oeuvre nous rappelle ici que l’homme, contrairement au créateur, ne peut que chercher à se rapprocher de la perfection par des tentatives successives.

Le livre, en plaçant ces photographies dans un contexte multi-sensoriel et multiculturel, emprunte une trajectoire Duchampienne, de confrontation libre pour atteindre une vision universelle de la nature de la perception humaine. Selon l’idée post-moderne que nous sommes constitués de langages, donc que nous ne sommes pas une personne mais plusieurs (en reference aux travaux de Deleuze ou de Guattari), nos identités sont mouvantes et évoluent à travers le temps.
Pour cette raison, le texte de Siri Hustvedt a ici été traduit en Français, en Braille et en Urdu, l’une des langues maternelles de l’artiste.

Le studio Nordsix a retranscrit cette experience multisensorielle dans le graphisme des pages. Différents papiers aux textures surprenantes, la plupart japonais, offrent des nuances infinies de gris, évoquant la multiplicité de nos états d’esprit.
Toutes ces versions du texte renvoient à différentes experiences et perspectives, qui finalement sont interconnectées.

La version anglaise du texte joue avec la transparence du papier pour créer par superposition des tableaux sans cesse renouvelés par des paragraphes mouvants, symboles de la synchronisation de nos états d’âme. La traduction du texte en Urdu a été sérigraphiée sur un papier gris foncé à la texture de tissus, et explore la répétition de la ligne à travers la page.
Enfin, pour le dernier cahier du texte qui rassemble les traductions en français et en braille, le studio Nordsix a inventé et dessiné une police qui surimpose le braille à notre alphabet afin de permettre aux lecteurs voyants et non-voyants une lecture simultanée du texte. Cette partie du livre est imprimée en offset et vernis, afin de preserver la dimension tactile du braille.

Le boitier du livre, conçu par l’artiste et l’éditrice, fait d’ardoise et de bois, évoque un codex mineral. Il abrite une tablette de céramique mystérieuse, créée par l’artiste, qui évoque la surface mouvante de l’eau et laisse entrevoir quelques phrases. En contemplant la surface de cette plaque de céramique qui reflète notre image en la déformant, on essaie de déchiffrer un message codé sans cesse mouvant. Il nous rappelle l’importance du language, qui oriente notre pensée et essaie en meme temps de cerner nos états d’esprit changeants.

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